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Le travail va-t-il disparaître ?
à déterminer
Pierre-Jean Dessertine

Le café-philo d'Apt ne pourra plus se réunir au Restaurant de La Tour de l'Ho. Il recherche un lieu d'accueil sur Apt.

Ce peut être un autre établissement bar-restaurant, ou aussi un espace dans un établissement public s'il permet d'apporter une collation à consommer sur place dans le respect des lieux.

Email :
cafephilo.apt@gmail.com


Premiers pas en Philosophie

C'est le titre du dernier bouquin de Pierre-Jean DESSERTINE : un manuel d'initiation à la philosophie, un parcours de l'histoire de la philosophie.

Pour en savoir plus, cliquez sur Premiers pas en Philosophie

L'errance : fuite ou sauvegarde ? Café-philo du 24 mai

Compte-rendu du café-philo du 24 mai 2013 – L'errance : fuite ou sauvegarde ? – présenté par Catherine Pageard
Pour réécouter l'intervention :
http://www.catherinepageard.blogspot.fr/2013/06/lerrance-fuite-ou-sauvegarde-telle.html

En s’appuyant sur un exemple, l’intervenante aborde l’errance comme une marche qui se démarque radicalement de la marche commune (déplacements utilitaires, promenades, etc.). L’errance apparaît toujours comme la quête d’un lieu qui ne semble jamais pouvoir être véritablement atteint.
Dès lors le problème qui est posé par l’errance est de savoir si elle exprime liberté humaine ou plutôt son impuissance.
La réponse proposée est multiple car sont multiples les figures de l’errance.

Il y a l’errance régressive qui répète son trajet indéfiniment car le lieu d’arrivée n’est jamais l’aboutissement de la quête. En effet, celle-ci visant le passé, elle ne peut trouver son objet dans le présent.

Il y a l’errance de purification qui vise à se dépouiller des oripeaux de la vie sociale pour nouer un contact plus intime et profond avec le monde.

Il y a l’errance de formation qui amène le tout nouveau adulte à « faire la route » pour mieux se connaître lui-même tout en découvrant le monde afin d’être plus lucide sur la place qu’il peut y occuper.

Il y a l’errance de décrochage sociale – vagabonds, clochards, zonards – pour laquelle l’activité de déplacement vaut pour elle-même comme substitut pour l’impossibilité d’être actif dans le cadre de la vie sociale. La fugue peut être comprise comme une forme éphémère (et souvent juvénile) de ce type d’errance.

On voit que certaines forme d’errance manifestent plutôt l’impuissance et la fuite, alors que d’autres sont plutôt du côté de la liberté et de la sauvegarde. Mais l’intervenante se garde bien d’essayer de réduire l’une à l’autre ; elle maintient cette bivalence de l’errance comme un motif essentiel pour stimuler notre réflexion.

Débat


L’idée que l’errance soit une quête de quelque chose de déterminé a été contestée en argumentant que ce qu’on appelle errance est spécifiquement le déplacement sans but, disponible, et aventureux.

Une issue à ce dilemme a été trouvée par recours à l’étymologique : « errance » est dérivé du même radical que « errements » et « erreur ». On peut alors considérer que l’errant a un but, mais qu’il le manque. Cela permet de rendre compte du caractère indéfini et aléatoire de son cheminement. Ce qui a d’ailleurs amené la remarque que l’errance pouvait être rapprochée du jeu.

On a fait valoir, à juste titre, que l’errance était bien plus large que sa forme marchée. Ceci n’était pas une critique de l’intervenante qui, justement, s’est limitée à la marche de façon à mieux cerner la problématique en l’alimentant de lectures de passages d’essais littéraires qui examinent de façon privilégiée cette forme d’errance. Mais cela a permis d’ouvrir le champ de la réflexion et amener à reconnaître en l’errance une dimension essentielle de notre humanité.

On a ainsi reconnu l’importance de l’errance dans les activités sociales (l’errance professionnelle), mais aussi l’errance dans les relations sentimentales, ou encore l’errance collective, comme celle des peuples déplacés par les aléas de l’histoire – l’exil et l’émigration peuvent ainsi être rattachés à l’errance.

Finalement on s’est accordé pour reconnaître que, loin d’être un phénomène de la marginalité sociale, l’errance nous concernait tous, et semblait toucher nos ressorts les plus intimes. C’est pourquoi ce thème a pu provoquer un débat à la fois passionné et passionnant.


Nous avons fait l’hypothèse, en conclusion, que chacun est ou a été, en quelque manière, errant. Car aussi bien l’histoire que l’archéologie montrent que l’espèce humaine, parmi toutes les espèces vivantes, est l’espèce errante par excellence.

Pierre-Jean DESSERTINE

Café-philo du 24 mai



L'errance : fuite ou sauvegarde ?

Marchons-nous pour fuir nos démons ?
Pour apprendre à être libre ?
Ou encore pour exprimer un mal-être existentiel ?

Présenté par Catherine Pageard,
diplômée de psychologie clinique, écrivaine et traductrice,
vit à Bonnieux, où elle enseigne le français à des adultes.



Le thème sera présenté par Catherine Pageard,  diplômée de psychologie clinique, écrivain et traductrice, qui vit à Bonnieux, où elle enseigne le français, langue étrangère, à des adultes. Ses traductions littéraires ont paru aux Presses de la Cité et chez Belfond ; ses traductions spécialisées, dans le domaine médical et paramédical grand public, aux éditions Sully et Trédaniel. Ses livres de cuisine, recueils à la fois de recettes et de préceptes diététiques, aux éditions Ambre.

Lectrice de Giono, elle a donné des conférences aux États-Unis dans le cadre des Alliances françaises et des articles au Bulletin des Amis de Jean Giono.
Passionnée des formes brèves, une grande part de ses nouvelles a été publiée dans des revues et recueils (L’oracle, Editions Sépia, Ecriture, Prix Albertine Sarrasin, journal d’artiste La Fabrique, Brèves, Mauves en noir....).

Autour de Rêves de passage, un recueil de proses poétiques paru en 2011 et de son thème (L'errance) : des lectures publiques et des échanges à retrouver sur le blog de l'auteur. www.catherinepageardblogspot.com





Marche ou errance  ? comment faire le distinguo ?
En s'appuyant pour commencer sur le livre de Frédéric Gros : Marcher, une philosophie.
Frédéric Gros, marcheur et philosophe, est l'éditeur des derniers cours de Michel Foucault.
Il décrit dans son livre la marche dans tous ses états et recense ces fameux états par l'entremise de figures connues :
•                     Nietzsche qui considérait que le vrai pêché contre l'esprit était de demeurer assis – voir aussi le livre que lui a consacré Stefan Zweig.
•                     Rousseau qui ne pouvait composer qu'en marchant
•                     Rimbaud, le génial piéton
•                     Kant, et sa promenade quotidienne

F   Frédéric Gros n'emploie le mot errance qu'à propos de Nerval et il parle alors de « marche fiévreuse de la quête ». Et c'est là, en effet, qu'il faut tracer la ligne de démarcation entre :
-   la marche que nous connaissons tous (balades dans la nature, promenades, déplacements en vile, flâneries)
            et
-  l'errance, expression d'une quête, recherche de quelque chose ou de quelqu'un.  
 
Le double visage de l'errance
errance choisie ou errance subie ?

Dans Daoren, un rêve habitable, Claude Margat, écrivain, marcheur et peintre taoïste écrit Sur le cercle de mon parcours, je retrouve chaque fois les livres, l'errance, la contemplation, l'atelier de peinture, le sommeil. Depuis plus de vingt ans, je me borne à explorer un secteur géographique réduit. J'y ai découvert d'incroyables trésors naturels... p 253
Claude Margat est taoiste. Il pratique la peinture de paysage à l'encre. Le secteur géographique dont il parle, c'est l'estuaire de la Charente, le marais charentais, les alentours de Brouage. Bien qu'il soit un marcheur émérite, il emploie également le mot errance – ou déambulation

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Gwenaëlle Aubry, philosophe et romancière, a retrouvé, à la mort de son père,  ses carnets dans une chemise sur laquelle il avait écrit «  A romancer ». Cet éminent juriste, professeur à la Sorbonne et enseignant à l'ENA,  souffrait de mélancolie : il était maniaco-dépressif.
Je vais lire, extrait du livre qu'elle lui a consacré (intitulé Personne et publié au Mercure de France) un passage qui pourrait porter pour titre : Fuir ! 

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Voici donc le double visage de l'errance : choisie et même revendiquée ou alors subie comme une sorte de malédiction.

Fugue et vagabondage.
Le mot dromomanie a disparu des dictionnaires. Il a été inventé en 1893 par Etienne Régis, un psychiatre qui exerçait ses talents à Bordeaux. Avant, on parlait d'automatisme ambulatoire ou somnambulique, de vagabondage impulsif. Ensuite il sera question de fugue amnésique ou consciente.
Dans tous les cas, il s'agit d'un abandon impulsif de domicile ou de lieu de travail à l'insu de l'entourage. Comme dans l'épisode de Jean B., le somnambule (in Rêves de passage) la destination peut avoir une signification affective ou symbolique. En général, le fugueur est seul. Mais les enfants et les adolescents partent parfois à quelques uns
Comment différencier la fugue du vagabondage ?
En référence à la durée.  
Le vagabond est un fugueur qui s'est installé dans la durée.

Il y aujourd'hui parmi les jeunes une forme de vagabondage, en partie saisonnier, qui par certains côtés s'apparente à la fugue. Jeunes en errance à la rencontre desquels est parti François Chobeaux et dont il rend compte dans un livre intitulé Les nomades du vide. Ces jeunes sont ce que l'on appelle encore aujourd'hui des zonards – le terme n'est pas péjoratif puisque que c'est ainsi qu'ils se nomment eux-mêmes. Nous ferons à cette occasion un petit détour par la zone.

Cette dimension de l'errance est évoquée dans Petite soeur, tiré de Rêves de passage.
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Les personnes présentes reconnaîtront peut-être une femme que l'on croise à Apt, puis en montant vers Saignon.
La lecture de ce texte permettra d'aborder une dimension bien particulière de l'errance : le fait qu'il y ait très peu de femmes errantes et clochardisées.    

Très peu de femmes parmi les clochards, les vagabonds, les zonards, les travellers : dix pour cent en moyenne. Il paraît que nous nous détournons moins facilement que  les hommes du réel,  que nous sommes plus résistantes à la désocialisation, moins sujettes à la pathologie du lien à soi aux autres au monde...